Le fil qui mène à Chélô


Ma grand-mère - coté Côté d'Ivoire - avait mérité d'être appelée Chélô. ça veut dire "beauté à couper le souffle, à te couper l'envie de faire quoi que ce soit d'autre que de la contempler et te faire tressaillir le cœur." Un jour, en naissant, j'ai hérité de ce nom.

Mon arrière grand-mère - côté Loire - faisait des napperons. elle les amidonnait avec de l'eau sucrée et ce n'est que des années plus tard que j'ai compris pourquoi j'avais passé ma tendre enfance à les sucer, en secret. Un jour, si je trouve comment, j'amidonnerai mes bijoux avec du sucre pour que les enfants puissent suçoter les colliers de leurs mamans.

Ma mère s'est toujours méfiée des rêves. Elle dit qu'il vaut mieux vivre.

Mon père, lui, ne croit qu'aux mots qui engagent et les appelle bavardages tant qu'ils n'ont pas prouvé qu'ils existent en agissant.

Mon frère est un arbre solidement planté dont j'aime taquiner les feuilles en me perchant sur ses branches pour parler aux étoiles.

Des amis, j'en ai toute une constellation qui scintille autour de moi en attendant patiemment que je décolle, enfin.

Moi, j'ai toujours rêvé de voler. Comme j'avais peur de tomber, je me suis tissé des ailes.

Alors, après avoir longtemps procrastiné, congelé mes perles, remballé mon fil, lancé des rêves en l'air, des mots à tort et à travers, je me suis lancée.

Et Chélô est née.